Un repos bien mérité

Au grand déplaisir des élèves, les effets de l'hiver daédrique prirent quelques temps avant d'être complètement dissipés. Si la neige de cendre et les vents violents étaient vite partis, le froid resta présent pendant plusieurs jours. Voyant que le temps redevenait peu à peu ce qu'il devait être, une douce chaleur d'automne, Ompak se rendit dans les chambres des professeurs blessés pour ouvrir les fenêtres. Les blessés parmi les professeurs étaient nombreux : Thanaris, Fyra, Sircophène et même une invitée du directeur adjoint, Lilium, qu'Ompak n'appréciait guère.

-Heureusement que cette brave Narcissa a décidé de s'occuper d'elle-même, pensa-t-il en se promenant dans le couloir des chambres. Avec toutes ses blessures, elle est tout de même capable de continuer son travail...

Fyra était bien réveillée, mais alitée pour ne pas trop forcer son corps endoloris. Bien évidemment qu'elle ne pouvait pas enseigner comme la plupart des professeurs! N'étant pas une personne de très forte carrure ni très endurante, Fyra allait passer plus de temps que la normale dans sa chambre, dans son lit, à lire des travaux de ses élèves ou à tout simplement rien faire parce que tout était trop forçant pour elle. Elle ne pouvait même pas aller voir Thanaris ou l'état des autres élèves! La professeur d'arts avait resté dans une sorte de demi coma pendant deux jours entiers parce qu'elle était trop faible et trop en douleur... Fyra ne savait donc pas vraiment ce qu'advenait de l'école!

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Lilium se réveilla dans une chambre qu'elle ne connaissait pas et avait énormément de misère à se souvenir de ce qui s'était passé avant de tomber inconsciente. Quand elle se souvint de ce qui s'était passé, mais savait qu'elle était dans un piteux état! Surtout son bras droit... Sinon, ses quelques côtes cassées étaient les seules blessures qui lui restaient qui faisaient atrocement mal. Les plaies et brûlures avaient été pansées et soignées pour la plupart quoiqu'elle avait encore quelques bandages. Découvrant, après quelques minutes, qu'elle était finalement dans l'école des Héros d'Arbar, Lilium se releva et étouffa un cri de douleur en posant pied à terre; peut-être quelque chose de cassé dans ce coin là aussi. Elle marcha quelques pas en sautillant à une jambe, mais perdit finalement équilibre et ne put s'empêcher de s'exclamer quand la douleur lui vint lorsque le sol vint rapidement contre son corps endoloris...

Le gobelin faisant sa ronde passa évidemment par la chambre où Fyra était installée. Lorsqu'il pénétra dans la pièce, un sourire aux dents pointues se dessina sur son visage alors qu'il s'approcha de la professeure. Il semblait visiblement content de voir que l'elfe se portait mieux et déposa sur une table de chevet un plateau en bois couvert de pots de toutes sortes ainsi qu'une tasse de thé.

-Comment se porte-t-on aujourd'hui, Fyra? demanda-t-il de sa voix aigue en ouvrant quelques contenants, remplis d'onguents et de pommades.

Alors qu'il prenait des nouvelles de la professeure alitée, un bruit sourd se fit entendre dans le couloir. Alerté, le gobelin allait se diriger vers l'origine du son lorsqu'il vit Narcissa Valentine passer devant la porte ouverte. Celle-ci, souriant malgré son visage et ses bras couvert de bandages, lui fit signe de s'occuper de Fyra avant de se diriger vers la chambre de Lilium.

Entrant dans la pièce, elle aperçut tout de suite la jeune prêtresse par terre, se tordant de douleur. La mercenaire se pencha vers elle pour l'aider à se relever, tentant de ne pas toucher de points sensibles, et s'adressa à elle d'une voix calme.

-Bonjour, je m'appelle Narcissa. Je ne crois pas que tu aies déjà entendu parler de moi, même si j'ai travaillé avec les daédriques pendant un certain temps. Mon allégeance est restée secrète aux yeux de tous, sauf Damascus. Tu n'as pas à avoir peur, tu es en sécurité ici.

Fyra sourit quand Ompak entra dans la chambre; il était le seul qu'elle voyait depuis qu'elle était alitée, les autres professeurs soit trop occupés ou tout simplement au lit eux aussi avec d'autres troubles à s'occuper! Elle parla au gobelin de service pour lui dire qu'elle allait bien, mais qu'elle espérait se retrouver en forme bientôt pour aller l'aider avec les autres blessés... Même si elle savait pertinément qu'elle n'allait pas avoir la chance de se rétablir avant les autres, dans l'état qu'elle était! Elle fut coupée dans son monologue, ayant énormément de choses à dire parce qu'elle ne voyait personne d'autre, par Lilium qui tombait. Elle regarda Ompak d'une façon à lui demander sans rien dire ce qui se passait.

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Lilium, quand elle vit Narcissa entrer, commença à se débattre avec elle-même pour se relever et s'éloigner de la mercenaire, surtout quand elle lui dit qu'elle avait fait partie des Daédriques d'une façon parallèle! Sa cloche n'était pas sur elle; elle dirigea rapidement son regard pour voir où elle était et son arme était enfouie dans une sorte de boîte de métal avec seulement la chaîne soudée autour de son corps qui sortait de la boîte métallique. Complètement folle de rage, Lilium cria de colère en tirant comme une démente sur la chaîne... Qui ne fit que faire le contenant de sa cloche tomber au sol avec fracas infernal!

Ompak fit signe à Fyra qu'elle n'avait pas à s'inquiéter alors qu'il prépara quelques baumes à lui appliquer. Écoutant les paroles de la professeure, il alla lui répondre lorsque le couloir fut traversé par un bruit métallique assourdissant. Se plaquant les mains sur les oreilles, le serviteur les retira pour ensuite expliquer à Fyra l'origine du son.

-C'est sûrement la jeune fille qui était avec les daédriques, dit-il. Sa cloche était greffée à son bras et donc nous ne pouvions pas lui enlever. La chaîne est indestructible normalement, il va falloir trouver un enchantement spécifique pour la détruire. En attendant, le directeur nous a proposé de l'entourer d'un immense bloc de fer qui coupe toutes les vibrations qui en sortent. Par contre, ça ne bloque pas les sons!

Devant le regard étonné de Fyra à la mention du directeur, le gobelin afficha un nouveau sourire avant de lui expliquer que le directeur avait donné un nouveau signe de vie après la bataille.

-Je ne sais pas par quel miracle il s'en est tiré, mais il a lui-même envoyé une lettre à Thanaris pour nous dire qu'il allait bien! Apparemment, il ne se trouvait même pas dans la théière que le directeur adjoint a brisé : il dit avoir changé de cachette la veille. Il me surprendra toujours, on dirait qu'il prévoit toujours tout à l'avance!


Dans la chambre de la prêtresse, le bruit fut encore plus cacophonique que dans le reste du couloir. Narcissa se plaqua les mains sur ses oreilles pour étouffer le bruit, surprise par la réaction de la prêtresse. Elle s'attendait à une réaction spontanée, voire même violente, de sa part, mais pas à ce qu'elle tire la chaîne et fasse résonner sa cloche.

-S'il te plaît, reste calme! dit-elle en lui faisant signe de ne pas faire de bruit. Tu es en sécurité ici et je comprends que l'endroit ne t'inspire pas confiance, mais tu dois te calmer. Tu vas juste aggraver tes blessures si tu continues.

Fyra ne savait plus quoi penser et se demandait si c'était une bonne idée de garder une ancienne Daédrique ici; elle voudrais sûrement donner sa revanche; n'était-ce pas elle qui était folle amoureuse de Deoxis et que c'était la demi elfe qui avait tué son amoureux? Fyra blêmit d'un seul coup en pensant à cela.

"Vous êtes certain, Ompak, que c'est une bonne idée de la garder ici? Elle cherchera la vengeance des Daédriques, c'est certain et, avec cette cloche, on ne sait pas ce qu'elle peut faire..."

Fyra regarda vers la porte où les cris de l'ancienne prêtresse Daédrique lui parvenait. Elle avait confiance en l'école, mais maintenant qu'une folle furieuse voulait sûrement sa mort à tout prix...

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Lilium s'éloigna de Narcissa en rampant, arrivant au bout de sa chaîne, au pied de son lit. L'ex prêtresse Daédrique la regarda avec hargne et ne cessât de tirer sur sa chaîne pour essayer de déprendre son lourd fardeau du cratère qu'il avait créé en tombant de la table de chevet.

"Partez! Laissez-moi tranquille! Je n'ai pas besoin de vous et de vos fausses gentillesses! Laissez-moi tranquille!"

Lilium était rouge de colère, son bras droit lui faisant atrocement mal et ses plaies quelques plaies restantes s'étaient réouvertes en bougeant de la sorte. Si elle continuait à faire ce spectacle, son état allait empirer...

Le gobelin continua de sourire en préparant ses médicaments, mais Fyra devina qu'il commençait un peu à se forcer. Elle comprit vite pourquoi quand il se retourna vers elle pour répondre à sa question.

-Je n'ai jamais voulu qu'on la garde ici, dit-il en chuchotant pour être sûr que sa voix ne porte pas jusqu'au couloir. C'est Thanaris et lui seul qui a décidé de la faire soigner à l'école : même le directeur est contre cette décision.

Dans l'autre pièce, Narcissa commençait à se demander si calmer la jeune femme était possible. La maîtriser serait un jeu d'enfant dans l'état dans lequel elle était, mais ce n'était pas son but. Sa mission était avant tout de s'assurer qu'elle se porte bien et qu'elle comprenne que les professeurs étaient ses alliés.

-Nous te laisserons partir dès que tu le voudras, dit-elle d'un ton conciliant. Tu n'es pas enfermée ici, nous voulons juste que tu guérisses de tes blessures. Si tu veux, nous pouvons te trouver un médecin ailleurs, à Harnesse.

Fyra fronça des sourcils tout en se disant "Attends que j'lui parle, voir!" elle resta ensuite en silence, souhaitant que le directeur adjoint vienne la voir pour qu'elle lui parle dans le casque!

"Tu crois que Thanaris viendra me voir bientôt?"

Elle regardait encore au travers du cadre de porte pour essayer d'y entrevoir quelque chose d'intéressant de la scène, mais c'était impossible vu que Lilium et Narcissa étaient dans une autre chambre!

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Lilium arrêta de bouger et de crier quand Narcissa lui dit qu'elle n'était pas prisonnière à Arbar et resta ainsi un long moment, la regardant sans aucune émotion affichée à son visage angélique. Après quelques instants en silence, elle se mit à rire comme une démente, rappelant à la mercenaire Deoxis... Elle pointa rageusement la cloche, son visage changeant du délire à la rage complète en un instant seulement!

"Que je ne suis pas prisonnière ici? Tu me prends pour une cruche ou quoi?! Ma cloche est dans une énorme boîte de métal, ma seule arme contre vous, espèces d'école de fous furieux! LAISSEZ-MOI PARTIR!"

Lilium s'était levée d'un bond et s'était élancée vers Narcissa en un même mouvement, ignorant la douleur pour essayer d'étrangler la mercenaire ou quelque chose dans le genre...

La jeune femme fit un grand pas vers l'arrière, juste assez pour que les mains de Lilium ne réussissent pas à atteindre son cou. La chaîne la retenait vers l'arrière par la taille, comme un chien attaché à une clôture. La mercenaire constata qu'elle était, en effet, prisonnière du bloc de métal.

-Ce n'est pas moi qui a voulu que tu sois attachée à ce bloc, dit-elle. Par contre, tu comprends peut-être pourquoi nous l'avons fait : dès ton réveil, tu as essayé de m'attaquer. Si ce n'était pas de ce bloc, tu serais peut-être déjà en train de me tuer. Je promets que nous pourrons te l'enlever lorsque tu seras calme et coopérative, on veut juste te protéger et s'assurer que tu guérisses.

Malgré les réactions aggressives et étranges de la prêtresse, qui n'étaient pas sans rappeler Deoxis, la mercenaire gardait son sourire gentil et dévoué. C'était comme si le calme qu'elle avait avant de reprendre son état psychologique normal s'était transformé en gentillesse.

S'attendant à une question de ce genre de la part de Fyra, Ompak retint un petit soupir avant de terminer sa préparation. Versant de l'eau chaude dans la tasse, il la tendit à Fyra tout en lui répondant.

-Je n'ai aucune idée de l'emploi du temps de Thanaris. Il a tant à faire après ce qui est arrivé : constater les dégâts, les blessés, les morts, rassurer les habitants d'Harnesse. Il ne pourra peut-être pas vous voir aujourd'hui, mais comme je le connais, il annulera bien un de ses projets pour venir vous rendre une petite visite. Il ne manque jamais une occasion de vous narguer...

Lilium tomba au sol en sanglotant, incapable de soutenir plus longtemps la douleur; l'adrénaline partie, elle devenait un pantin de sa douleur... De plus, son attitude la rappelait Deoxis qui était mort sous ses yeux... Par cette fichue professeur d'arts! L'ancienne prêtresse des Daédriques se retourna faiblement vers Narcissa, de longues lignées de larmes bafouillait ses joues et collaient ses cheveux à son visage.

"Je ne veux rien savoir de cette école et de ses habitants! Que vous soyez tous maudits! Je souhaiterais tous vous avoir tué quand j'en avais l'occasion, si je l'avais fait... Il... Il..."

Lilium ne put finir sa phrase et cacha son visage entre ses bras, son plâtre lui conférait déjà un bonus pour cela!

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Fyra prit la tasse et réchauffa ses mains moites sur le brevage brûlant. Elle attendrait un petit moment avant de le boire, le temps qu'il se refroidisse. La professeur d'arts fût déçue d'entendre qu'Ompak ne savait pas si le directeur adjoint allait venir lui rendre visite, mais fût -en quelque sorte- heureuse d'entendre qu'il pourrait annuler ses plans pour venir la taquiner. Au moins, elle occupait cette partie là dans sa vie!

"Merci, Ompak, de m'avoir tenu compagnie. J'espère guérir assez vite pour venir t'aider dans tes tâches; tu devrais être débordé!"

Fyra but une gorgée de thé et s'étouffa presque dessus tellement il était chaud! Elle le posa sur la tablette que le gobelin de service lui avait apportée et fit de l'air vers son visage de l'autre main.

"J'espère que monsieur Thanaris ne boit pas ses brevages à cette température; il va mourir calciné de l'intérieur sinon!"

Elle toussota encore un peu et reprit la tasse pour se réchauffer les mains. Elle se demandait bien s'il y avait des feuilles de thé dans le fond de la tasse, comme les devins le faisaient.

Entendant la remarque de la professeure d'arts, le gobelin soupira et elle l'entendit marmonner : ''En effet, si seulement il pouvait mourir de l'intérieur, ça lui rendrait service''. Elle n'eût pas le temps de s'interroger plus longtemps sur la signification de cette phrase car, justement, Thanaris entra dans la pièce. Il était vêtu de son habituel manteau rouge, même si il portait de nombreux pansements en-dessous.

En entrant, il fit d'abord un sourire à Ompak et à Fyra avant de se retourner vers l'origine des bruits venant de la chambre de Lilium. Une grimace se dessina sur son visage, semblant un peu inquiet de la situation. Il s'approcha ensuite du lit de la professeure et ferma la porte derrière lui. Silence total. Il posa ensuite ses fesses sur les couvertures, aux pieds de l'elfe.

-Je m'excuse pour tout le grabuge que la daédrique cause, dit-il. C'est moi qui ait décidé de la garder en vie et j'ai mes raisons. Elles ne sont peut-être pas bonnes, mais elles sont indiscutables. Si elle blesse quelqu'un, par contre, Narcissa s'arrangera avec elle.

Narcissa qui, justement, s'approchait de la prêtresse pour tenter de la rassurer. Elle ne savait pas trop comment s'y prendre avec quelqu'un qui venait de perdre ses proches pour la simple et bonne raison qu'elle n'avait jamais eu de proches. Du moins, de ce qu'elle se souvenait! Elle opta donc pour un pas calme vers Lilium pour l'entourer de bras réconfortants. Le pire qu'elle pourrait faire, ce serait de la mordre!

Fyra questionnait Ompak du regard quand Thanaris entra pour ne pas qu'elle ait à poser la question de vive voix. Elle posa son regard sur le directeur adjoint quand celui-ci posa son derrière sur son lit et le regarda sévèrement pendant qu'il tentait de s'expliquer. Fyra, hautaine et, disons, jalouse, détourna le regard rapidement, la tête haute et les bras croisés!

"C'est une marque de respect, Monsieur le directeur adjoint, de garder une ancienne prêtresse de nos ennemis avec nous... De la maintenir en vie... Quand elle veut me tuer! Vous voulez ma mort?!"

S'exclamant haut et fort sur ses deux dernières phrases, elle plongea un regard furibond sur Thanaris en attendant une réponse de celui-ci pour qu'elle l'envoie se promener. Certe, son respect pour lui avait déscendu parce que Lilium voulait sans aucun doute tuer Fyra et, ayant une partie d'elfe, elle saurait lui en vouloir pour LONGTEMPS!

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Lilium, quand Narcissa vint pour la prendre dans ses bras s'écria de toute la capacité de ses poumons! Ayant une voix assez forte de nature, son cri se fit entendre dans toute la Tour des Professeurs et même plus! Elle ne se débattit pas, par contre, vu qu'elle ne voulait pas aggraver son état.

"Laisse-moi tranquille, sale pantin! Je ne veux pas avoir de tes sales pattes sur mon corps saint! LAISSE-MOI!"

L'ancienne prêtresse Daédrique criait de plus en plus fort et faisait de plus en plus de bruit. Son état ne faisait qu'aggraver; elle semblait devenir plus démente au fil des secondes...

Thanaris alla répondre à Fyra après quelques secondes d'étonnement, mais le cri que la prêtresse poussa le fit sursauter. Tournant la tête en direction du couloir, il se demandait se qui se passait du côté de la mercenaire. Celle-ci savait très bien que la prêtresse avait été, comme elle, victime d'un lavage de cerveau. Toutefois, la méthode avait été bien différente : Narcissa avait été littéralement possédée et manipulée contre son gré alors que Lilium, elle, avait été convertie et élevée par le chef daédrique.

-La tâche ne sera pas facile, pensa-t-elle en reculant lentement, laissant la jeune femme tranquille. Le contact physique est une mauvaise idée, elle est encore folle furieuse. Il va falloir attendre qu'elle se calme un peu.

Dans la chambre, le directeur adjoint reporta ensuite son attention vers la professeure d'arts. Voyant qu'elle était inquiète, mais aussi particulièrement fâchée, il ne put que comprendre l'origine de son malaise.

-Tout est sous contrôle, dit-il en tentant de rassurer son employée. Narcissa s'occupe de la jeune femme et s'assurera de la sécurité de tous. Je vous assure que vous n'avez absolument rien à craindre pour ce qui est de la prêtresse.

Voyant que l'elfe était profondément atteinte dans ses sentiments, le directeur adjoint se demanda si il devait aborder le sujet duquel il devait lui parler. Constatant qu'il devrait le faire un jour ou l'autre, il soupira et s'adressa à elle d'une voix bien plus triste.

-Excusez-moi de changer de sujet, mais j'ai quelque chose à vous annoncer. J'ai reçu ce matin le rapport de la bataille et si je suis heureux de voir les daédriques hors d'état de nuire, la liste des décès me brise le coeur. Près d'une centaine d'élèves sont morts, ainsi que deux de nos meilleurs professeurs. Xanaphé et Harkle ont péri par la main des daédriques.

Fyra savait très bien que plusieurs des membres de l'école d'Arbar avaient péri, mais elle ne savait pas que deux professeurs avaient laissés leurs vies dans la bataille! Xanaphé n'était pas une personne à laquelle Fyra s'était attachée et ne l'aimait pas vraiment, mais elle était quand même triste d'apprendre la mort de sa collègue... Une des seules professeures féminine! Par contre, Harkle, le professeur d'invocation, elle le connaissait quand même et était attérée d'apprendre la mort de celui-ci. Les larmes remplirent ses yeux et elle détourna les yeux du directeur adjoint, incapable de regarder quelqu'un dans les yeux quand elle démontrait ses émotions. Étant professeure des arts, elle était assez bonne pour retenir les larmes de couler de ses yeux. Elle se moucha, son nez plein.

"Bon, nous allons devoir trouver d'autres professeurs compétents alors..."

Elle exprima une fois de plus sa colère contre Thanaris en lui levant le nez sans le regarder directement.

Voyant que sa révélation avait peut-être été mal placée, le directeur adjoint soupira et regarda le sol, piteux. La culpabilité l'avait envahie pendant toute la journée et chaque cadavre sur lequel il avait posé les yeux n'avait fait que renforcer ce sentiment. Cette fois, l'attitude de Fyra ne fit qu'empirer les choses.

-C'est tout ce que j'avais à dire, dit Thanaris, à bout de forces.

Se levant péniblement du lit, il s'apprêta à quitter la pièce sans même accorder un signe de tête à Fyra ou à son serviteur gobelin. Intérieurement, il espérait bien que la professeure s'adresse à lui avant qu'il quitte la pièce, mais ne savait pas si discuter avec elle était une bonne idée. Ils avaient tous besoin de repos...

Fyra, voyant l'état piteux de Thanaris, eût un coup de remords et se mordit la lèvre inférieur, elle glissa ses jambes sur le côté de son lit, s'asseyant sur le bord comme pour débarquer, mais eût un élan de douleur qui lui donna le vertige. Elle s'aggripa donc sa tête qui tournoyait toute seule et resta en silence le temps de revenir à sa vision normale et non à celle où la pièce tournoyait en tous sens!

"Thanaris..."

La professeur d'arts voulait ajouter autre chose, mais dût s'en empêcher elle-même pour ne pas régurgiter. Elle déposa sa tasse de thé sur la petite tablette qu'Ompak avait apporté et garda l'autre main contre son front pour essayer d'arrêter le tout de tourner!

Lorsqu'il entendit que sa collègue l'interpellait, le directeur adjoint se retourna. Constatant que Fyra se trouvait dans un mauvais état, il fit demi-tour et se dirigea vers elle, lui posant une main sur l'épaule pour l'inciter à se recoucher. Ompak, lui, attendit que la professeure semble se porter mieux avant de cesser de paniquer.

-Restez couchée, dit Thanaris d'une voix calme en vérifiant si la professeure ne faisait pas de fièvre. Je pense que votre corps ne s'est pas encore remis de son expérience. Que vouliez-vous me dire?

Fyra se coucha tranquillement avec l'aide du directeur adjoint et posa un regard incitant Ompak à sortir de la pièce. Elle rougit juste assez pour que cela soit difficile à remarquer, mais Thanaris étant un professeur de l'art de l'assassinat qui devait à tout prix reconnaître les plus petits des détails devrait sûrement l'avoir remarqué... Et l'avoir pris pour de la fièvre, peut-être! Elle s'éclaircit la gorge, sa vision étant beaucoup moins trouble et étourdissante depuis qu'elle était couchée.

"Vous savez... Ce n'est pas de votre faute. Ils sont sûrement bien, leur âme maintenant en paix, où ils sont. C'était leur heure et ils savaient ce qu'ils risquaient. Ils savaient qu'ils auraient pu partir, mais ils voulaient être à vos côtés... Même moi, qui ne suis pas une adepte du combat, je suis restez avec vous et ai risqué ma vie pour une bonne cause; la vôtre."

Fyra sourit gentiment à Thanaris, ayant utilisé le peu de son charme naturel parce qu'elle ne pouvait utilisé la magie qu'elle avait dans cet état pour calmer l'âme anxieuse du directeur adjoint. Elle espérait l'avoir fait se sentir mieux...

Le serviteur gobelin comprit vite ce que le regard de Fyra signifiait et s'inclina poliment avant de quitter la pièce, un sourire complice aux lèvres. Fermant la porte derrière lui, il se rendit au bureau de Thanaris pour y classer quelques papiers. Celui-ci, écoutant attentivement le message de sa collègue, afficha un faible sourire.

-Vous avez raison sur ce point, dit-il, convaincu. Ils ne se battaient pas seulement pour moi, mais aussi pour leur famille et leur maison. Je suis fier d'eux et des élèves qui se sont battus pour protéger Arbar. Vous plus que quiconque, Fyra : vous êtes restée à mes côtés malgré les terribles blessures que la daédrique vous a infligées. Sans vous, Deoxis m'aurait peut-être vaincu. Sa mort me laisse de glace, ce n'est plus mon frère depuis le jour où je l'ai quitté. J'ai voulu le sauver, mais c'était en le tuant réellement que j'aurais pu lui épargner la douleur.

Le discours de Thanaris sur son frère sembla peu appropriée selon Fyra, qui vit très bien qu'il avait volontairement changé de sujet. Malgré ses belles paroles, la professeure voyait très bien qu'il avait menti sur ses émotions face à la mort de son frère. Il semblait bouleversé, mais chose sûre, n'en voulait pas à Fyra.

Fyra remercia intérieurement le gobelin de service d'avoir quitté la pièce et rougit un peu; juste assez pour être remarquable! Elle fit mine d'avoir un chat dans la gorge et tourna un peu la tête quand Thanaris fit mention de sa présence à ses côtés. Par contre, les tons que le directeur adjoint employait pour parler à la professeur était très évident -pour ses oreilles d'experte- que cela ne le laissait pas de glace. Elle se tourna vers lui et fit un regard doux, cherchant à prendre la main de Thanaris pour lui faire comprendre qu'il pouvait lui faire entièrement confiance et aussi pour lui démontrer qu'elle était totalement à sa disposition s'il avait besoin d'aide.

"Vous savez que vous pouvez pleurer la perte de votre frère; cet homme était peut-être plus le même qu'avant, mais tout de même... Les liens fraternels sont très forts, surtout entre deux orphelins!"

Fyra fit un sourire réconfortant au directeur adjoint -du moins, le plus réconfortant qu'une malade peut faire!- et flatta le dessus de la main qu'elle tenait avec son pouce.

Remarquant que la professeure, même dans un état de faiblesse, était toujours capable de reconnaître les émotions cachées, Thanaris soupira. Regardant la main que Fyra flattait doucement, il laissa sortir la tristesse qu'il gardait en lui.

-Ce que j'ai dit est vrai, dit-il. Du moins, je le pensais. Il n'est vraiment plus le frère que j'ai connu. Ma plus grande déception, c'est de n'avoir jamais pu le retrouver tel qu'il était. J'ai attendu pendant toutes ces années pour le retrouver, j'avais demandé à tous les recruteurs de lui donner une lettre de l'école si ils le voyaient. Ils l'ont eu avant nous et voilà le résultat.

L'elfe ressentait chez le directeur adjoint une grande déception, mais aussi une terrible frustration. Elle su qu'au fond de lui, même si cela était sûrement impossible, il aurait tout fait pour le sauver.

Fyra lui sourit, sachant que le directeur adjoint venait de lui dévoiler un énorme secret. Elle voulait rester douce pour le consoler et savait quels mots lui dire. Par contre, elle n'avait pas la magie ni la force nécessaire pour l'aider trop longtemps; son corps était encore très faible et la professeur ressentait la fatigue peser sur son pauvre corps.

"Vous avez essayé, vous avez cherché, mais le destin a voulu que vous ne soyez pas réunis. Ce qui compte, maintenant, est que votre frère repose en paix, que vous avez fait de votre mieux et que vous ne vous laissez pas démoraliser par cela. Changez-vous les idées, Monsieur le directeur adjoint, faites ce que vous avez envie de faire; prenez des vacances s'il le faut!"

Elle gloussa en parlant de prendre congé à Thanaris. Bien évidemment qu'elle offrait son aide si jamais on en aurait besoin, c'était évident avec le ton et le sourire radieux qu'elle lui offrait, soutenant avec peine la fatigue qui pesait sur son être.

Entendant l'idée de Fyra, le directeur se mit à ricaner de façon peu enjouée. Il avait trouvé l'idée drôle, mais en même temps, il ne put s'empêcher d'être défaitiste, comme il l'expliqua à Fyra.

-Prendre congé? dit-il. Dans un moment aussi critique? L'école vit un de ses pires moments depuis l'arrivée des daédriques et même si nous en sommes débarassés, je ne peux pas m'arrêter là.

Alors qu'il prononça ces mots, la professeure vit la couleur de ses yeux se déplacer lentement, comme un nuage de fumée. Ses pupilles se déformaient légèrement, devenant peu à peu jaunes et luisantes, la même couleur que le jour où il avait failli la tuer!

Fyra écarquilla les yeux de peur et se redressa pour s'approcher du directeur adjoint. Elle regarda au dessus de son épaule, vers la porte.

"Ompak, la potion, vite!"

Elle se retourna ensuite vers Thanaris pour placer une de ses mains à la peau satinée sur son sa joue. Elle lui sourit calmement, prenant contrôle sur ses émotions et plongea son regard dans le sien.

"Thanaris, calmez-vous, je vous en prie. Ompak va arriver avec votre potion et tout va bien aller."

Elle ne voulait pas reparler du problème de prendre des vacances, même si elle allait se proposer de prendre sa place, quand elle serait mieux, pour l'aider à se rétablir de la perte de son frère. Fyra serait sûrement capable de prendre sa place pour un petit bout...

N'ayant visiblement pas connaissance de ce que la professeure voyait dans ses yeux, le directeur adjoint la regarda d'un air interrogateur. Même si son regard prenait la couleur de celui du Thanaris fou, il gardait toutes les émotions du vrai directeur adjoint.

-Qu'y a-t-il? demanda-t-il, alarmé, alors qu'Ompak fit son entrée dans la pièce armé d'une théière fumante.

Le professeur d'assassinat se retourna pour apercevoir son serviteur, qui vit la lueur jaune danser dans ses yeux. Se précipitant vers la tasse vide qui se trouvait sur la table de chevet de Fyra, il la remplit sans quitter son supérieur des yeux. Lui tendant la tasse, il attendit que Thanaris la boive. Celui-ci but le tout d'un trait, sans rouspéter, mais fit une grimace lorsqu'il sentit le breuvage brûlant sur sa langue. Un être normal aurait sûrement recraché le liquide, mais Thanaris semblait habitué à ce genre d'urgences.

-Que se passe-t-il? demanda Thanaris à son serviteur et à sa collègue. J'ai pourtant pris ma potion juste avant d'aller constater les dégâts dehors! Ne me dites pas que mes yeux sont redevenus jaunes...

Hochant lentement la tête pour confirmer la crainte de son maître, Ompak le regarda d'un air désolé avant de lui enlever doucement la tasse des mains. Surpris, le directeur adjoint fixa les deux personnes présentes, comme pour leur demander si l'éclat jaune était parti. Il y était toujours.