Le voyage de Thanaris et Fyra

Fyra, continuant à garder son masqué gêné, se décida qu'elle devait bouger pour que son jeu puisse continuer. Elle se dirigea donc vers ses effets, encore une fois, pour qu'elle puisse les ramasser et qu'ils puissent partir.

"En fait, je ne vois pas ce que je vous cache; il me semble avoir déjà mentionné que l'argent n'était pas un de mes problèmes et que mon père était un riche marchand. De plus, c'est vous qui organisez le voyage et non moi donc je ne vois pas ce que je pourrais bien avoir concocté comme plan."

Elle se pencha vers les tableaux qu'ils avaient laissés de côté pour les prendre, dos à Thanaris une fois de plus. Allait-il encore la ramener vers lui ou allait-il l'aider à tout ranger pour qu'ils puissent partir et continuer leur voyage?

Cette fois-ci, le masque de gêne et les mouvements de recul semblaient avoir eu leur effet sur Thanaris, qui décida tout simplement d'aider la jeune femme à ranger ses affaires avant de partir. Il se mit à parcourir la pièce en prenant ses choses et celles de Fyra, les fourrant dans leurs sacs respectifs pour se préparer à quitter la chambre de l'auberge.

''Je sais bien'' dit-il en riant. ''Seulement, je ne savais pas que tout cet argent était en votre disposition pendant notre voyage. J'imaginais que vous l'aviez laissé dans un endroit plus sûr, à l'abri des égarements ou des brigands. Bon, après tout, ce n'est pas comme si c'était mon or! Vous en faites ce que vous voulez.''

Il prit son sac une fois qu'il eut terminé de tout ranger à l'intérieur, faisant signe à la professeure qu'il était prêt à partir. ''Prête à continuer le voyage, Fyra?'' demanda-t-il.

Fyra lâcha d'être gênée aussi soudainement qu'elle avait commencé à l'être! Elle finit de ranger ses choses aussi rapidement que Thanaris et fut à la porte au même moment que le directeur adjoint. Elle lui sourit, indiquant que ses bagages étaient prêts et entamna la descente vers l'extérieur.

"Bien évidemment que je n'ai pas tout apporté! Bien évidemment, j'en ai apporté assez pour subvenir à tous nos besoins même si je savais que vous alliez vous en charger, mais c'était aussi au cas où je voyais des souvenirs que je voulais et que je n'avais pas l'intention de me laisser courtiser..."

Prenant à l'assaut la phase deux de son petit jeu, Fyra lança un clin d'Oeil au directeur adjoint lorsqu'elle entra ses valises à l'intérieur de sa charette, prête à partir, sautant sur le banc conducteur à l'avant.

Thanaris soupira en entendant ses explications. ''C'est exactement ce que je croyais, mais si elle dépense tout en potions, elle peut dire adieu à ses souvenirs'' pensa-t-il en rangeant son sac dans la calèche avant de monter à son tour. Après s'être assuré que les chevaux étaient prêts au voyage qui s'annonçait, il fit signe à Fyra d'avancer et déplia une carte qu'il avait sorti de son manteau.

''Notre prochain arrêt devrait être un peu plus intéressant pour ce qui est de vos souvenirs'' expliqua-t-il. ''Amherst, une assez grande ville qui fait partie du comté d'Ovkin. C'est un assez bel endroit, avec beaucoup d'échoppes et de tavernes. J'imagine qu'on y trouvera bien un petit quelque chose à faire ou à acheter. Ce n'est pas trop loin d'ici, nous y serons sûrement d'ici ce soir si la route est aussi bonne qu'avant.''

Fyra mit leur véhicule en marche aussitôt que Thanaris fût embarqué dessus. Lorsque le directeur adjoint mentionna la ville où ils allaient passer une soirée, Fyra s'écria de bonheur, tout sourire!

"Amherst! Une très belle ville! J'ai déjà hâte d'y être! Un de mes cousins, Alphonse, y habite! De plus, la taverne La Botte Dorée est une de mes favorites! Elle appartient à ma tante, charmante femme! Je vous présenterai!"

Après s'être autant exprimée avec joie, Fyra dût respirer! Elle prit une bonne inspiration et, par réflexe, accota sa tête contre l'épaule à Thanaris, visiblement heureuse qu'ils passent par cet endroit.

Avec la tête de la jeune femme posée sur son épaule, ses cheveux pleins de la chaleur du soleil, le voyage se passa vraiment très vite aux yeux de Thanaris. Parcourant la route plane et sûre qui s'offrait à eux, le voyage se déroula sans complications pendant de nombreuses heures et l'absence de nuages dans le ciel était de bonne augure. Toutefois, la calèche dût ralentir lorsqu'ils virent, au loin, une caravane arrêtée à côté du chemin. Il n'y avait personne aux alentours, mais le véhicule semblait en assez bon état: il n'était pas là depuis longtemps.

Le regard du directeur adjoint se porta sur l'embarcation arrêtée avant de tourner la tête vers Fyra, alerte. ''C'est sûrement un piège tendu par des bandits, histoire d'attirer les curieux'' dit-il silencieusement. ''Restez sur vos gardes, il se peut que vous ayez à faire galoper nos chevaux aussi vite que possible si nous sommes attaqués.'' Il se mit ensuite à fixer la caravane, tentant de voir si il s'y trouvait quelque chose, ou quelqu'un.

Fyra aussi était sur ses gardes, ayant vu ce coup monté plusieurs fois. Par contre, quelque chose clochait... Elle ne savait pas quoi, mais avait l'intuition que quelque chose n'allait pas aussi bien tourner que les autres fois! Faisant ralentir sa calèche tout en hochant la tête aux paroles de Thanaris, Fyra, plus près de l'autre véhicule que Thanaris, plongea son regard à l'intérieur... C'était sombre puisque des toiles étaient posées pour faire de l'ombre à l'intérieur. Fyra, de son angle, pouvait voir un peu à l'intérieur... Un cri d'horreur sortit de sa gorge tandis qu'elle arrêta complètement ses chevaux, tout près de la caravane. Elle débarqua rapidement de son siège et arriva vite sur celui de la caravane.

Fyra ouvrit les battants de tissus pour dévoiler l'intérieur de la caravane; deux petites fillettes, humaines, ligotées l'une à l'autre qui pleuraient. Quelques traces de bagarre, mais aucun bandit. Par contre, les bandits dévoilèrent assez rapidement leur position tandis que Fyra, accroupie près des petites filles, semblaient sur le bord de les libérer.

Quatre hommes d'un bord, armés jusqu'aux dents, s'approchèrent en criant de s'arrêter tandis que trois de l'autre côté sortir de derrière de grosses pierres, armés d'arbalètes lourdes. La professeure ne sembla pas réaliser que quatre hommes s'avançaient en la menaçant de leurs armes tandis que trois autres les visaient de leurs arbalètes! La demie elfe restait assise et bougeait peu...

Quand Thanaris vit Fyra descendre du véhicule pour se diriger vers la caravane, il fut sur le point de la suivre quand il réalisa qu'il était beaucoup plus sûr pour eux qu'il reste sur la charrette. Non seulement fallait-il que quelqu'un protège les choses à l'intérieur, mais aussi était-il plus sûr de ne pas se montrer et de se jeter dans un éventuel piège. Si l'un d'eux était pris, l'autre pourrait agir. ''Si ce sont des bandits, ils n'oseront pas l'attaquer'' pensa Thanaris. ''Ils préféreraient bien plus la ramener vivante à leur campement...''

Remarquant que des hommes sortaient de leur chachette pour aller encercler la jeune femme, le directeur adjoint décida qu'il était temps de passer à l'action. Par contre, le nombre d'opposants le découragea. Seul contre sept, en considérant que Fyra allait sûrement être capturée ou immobilisée, il n'avait presque aucune chance de survie. L'elfe regretta son état de transformation instable: s'il avait été capable de se contrôler comme il le faisait avant, il aurait tué tous ces hommes d'un coup comme il l'avait fait dans l'arène, contre les fanatiques daédriques. Cette fois-ci, l'option était aussi envisageable que la mort, car elle serait aussi dangereuse pour les bandits que pour Fyra et lui.

N'ayant pas plus de quelques secondes pour réfléchir, Thanaris se perdit un peu dans ses idées et finit par être repéré par un des bandits. Surpris, le brigand décocha un carreau en sa direction, qui vint se planter dans la charrette. Quand ses comparses se retournèrent, alertés, ils ne virent rien d'autre qu'une carriole vide. ''J'vous jure que j'ai vu quelqu'un!'' hurlait l'homme, abasourdi. Les bandits, soucieux, se dispersèrent en petits groupes tout en gardant trois hommes pour surveiller les enfants attachés et la professeure.

Avant qu'ils purent se disperser, un des hommes se mit à crier de terreur tout en se jetant pour arrêter Fyra... Un instant trop tard! La professeure se retourna d'un seul coup, la main tendue vers les brigands, criant les dernières parole de son incantation. Une boule de feu jaillit alors... Malheureusement pour Fyra, elle n'avait pas envisagé qu'un des hommes se rapproche et ne put dévier sa trajectoire au dernier moment. Sachant qu'elle allait aussi être frappée, la demie elfe se jeta sur les enfants pour les protéger de son propre corps tandis qu'une explosion de feu rageait derrière elle, tuant du coup l'homme qui s'était approché, les chevaux de la carriole sur laquelle était les captives et blessa d'autres hommes, en laissant mourrant ou en feu.

Thanaris, qui s'était tout simplement caché à l'intérieur du véhicule en l'espace d'un instant, ne s'attendit pas du tout à entendre une explosion à l'intérieur. Comprenant qu'il s'agissait à coup sûr du sort de boule de feu de Fyra, il sortit toutefois immédiatement, comprenant que le sort avait très bien pu blesser la professeure aussi. ''Fyra!'' hurla-t-il en espérant qu'elle lui réponde pour lui donner un signe de vie. Se ruant vers la caravane enflammée, contournant les corps brûlés des brigands, assénant un coup de pied à l'un d'eux qui tenait encore debout, il arriva vite près de la demi-elfe et des enfants. Restait à constater leurs blessures...

Fyra, qui avait les cheveux attachés, s'était protégé le derrière de sa tête de ses bras, sauvant ainsi ses cheveux d'être brûlés... Le reste de son corps ne fut pas aussi chanceux... Ses bras avaient été sévèrement brûlés ainsi que le milieu de son dos. La robe longue qu'elle portait avait maintenant une belle grosse ouverture sur tout le dos, finissant presque à la naissance de ses fesses. Lorsque Thanaris eût crié son nom, la professeure lui répondit d'un "Ici" étranglé. Le directeur adjoint sût que c'était à cause de ses larmes qu'il n'avait pas été si fort. Par contre, malgré la douleur, la demie elfe réussit à se redresser, seule, des deux petites filles, intactes, sous elle. Une des deux s'était évanouie tandis que l'autre pleurait à chaudes larmes, traumatisée. Se retournant pour faire face à son compagnon, ses bras tremblants et qui sentaient la viande roussie tenant les lambeaux de sa robe contre elle-même.

"Pou... Pouvez-vous emenner les petites dans ma calèche? Je... J'arrive dans quelques instants... J'ai... Tout simplement rien... Pour les détacher."

Fyra regarda avec douceur les deux petites, leur chochottant que tout allait bien maintenant. Elle ne semblait pas se rendre compte de ses blessures tellement elle était heureuse de voir que les petites allaient bien ni même se rendre compte que de lourdes larmes coulaient le long de ses joues rougies. Brisant l'instant de tendresse de la professeure, un carreau d'arbalète vint se loger juste à côté de sa tête, trop surprise pour la faire crier.

Thanaris avait été bien trop préoccupé par ce qu'il voyait pour porter attention à ce qui se passait aux alentours. Quand il vit et entendit le carreau d'arbalète fuser non loin de la tête de la professeure, il se retourna et repéra le bandit allongé par terre qui tenait l'arme en main. D'un bond, il se jeta sur lui et lui asséna un terrible coup de pied à la gorge, assez fort pour le tuer. L'homme poussa un cri étranglé et cessa de bouger. Le directeur adjoint alla ensuite rejoindre Fyra au plus vite, prit les deux fillettes sur ses épaules et courut jusqu'à la calèche sans quitter la professeure des yeux. ''Allez vous étendre dans le chariot, on va devoir examiner vos blessures'' dit-il. ''Comment vous sentez-vous?''

Fyra hocha de la tête, mais ne s'étendit pas lorsque Thanaris lui parla; ses blessures au dos lui feraient bien trop mal sinon! Elle avait caché les yeux des enfants lorsque le directeur adjoint avait fini l'homme à l'arbalète, mais n'avait pu leur cacher les oreilles aussi. La demie elfe resta assise pendant un court moment, attendant que Thanaris la rejoigne.

"J'ai vécu pire... Quand on s'essaie avec boule de feu, pour la première fois, on risque plus de se faire exploser notre propre sort en pleine figure qu'autre chose... Ce qui m'est arrivé."

Elle sourit au directeur adjoint, mais son sourire cachait assez mal le fait qu'elle éprouvait énormément de douleur. Pourtant, elle semblait capable de se servir de ses mains, mais de se lever, elle n'avait pas encore essayé...

Le directeur adjoint hocha lentement de la tête en écoutant ce que la jeune femme lui racontait, conscient qu'elle devait être plus habituée aux blessures qu'elle ne le paraissait. Elle avait beau passer pour une faible femme, elle pouvait endurer des douleurs insupportables pour quelqu'un d'ordinaire. Les professeurs à Arbar n'étaient pas choisis pour leurs beaux yeux et Thanaris le savait très bien... quoiqu'il eut bien engagé la demi-elfe en partie pour cette raison.

''Vous allez avoir besoin d'aide pour vous déplacer?'' demanda-t-il en lui tendant les deux mains. ''Aussi, que comptez-vous faire des enfants? Nous ne pourrons pas les garder avec nous pendant une bonne partie du voyage sans manquer de vivres, alors je crois que nous devrions les laisser à l'orphelinat d'Amherst.''

Fyra hocha la tête avec un soupire triste lorsque Thanaris lui demanda si elle aurait besoin d'aide pour se déplacer. Par contre, son visage se déforma par la colère lorsqu'il parla d'orphelinat et d'y laisser les enfants.

"Je n'ai jamais laissé un seul enfant chez des inconnus et je ne commencerai pas aujourd'hui! Si c'est les vivres qui manqueront alors j'en paierai!"

Sur ce, elle essaya de se relever, s'aidant de ses mains au sol, mais elle hurla presque de douleur en retombant au sol, une grimace encore plus prononcée au visage; de la douleur!

Le directeur adjoint s'attendait à ce que la jeune femme aie peine à se relever, aussi lui prit-il les mains pour l'aider à se relever. Il aurait voulu la prendre par l'épaule et le ventre, mais le risque de toucher à une brulûre était trop grand. L'aidant à entrer à l'intérieur du chariot avec les deux fillettes, il alla fouiller dans son sac pour en sortir quelques fioles. Il hésita pendant un moment, puis se décida à prendre la bleue plutôt que la verte. Il versa le contenu liquide sur les blessures de la professeure, tout en répondant à ce qu'elle venait de dire.

''Que voulez-vous faire, alors?'' demanda-t-il. ''Les garder avec nous jusqu'à ce que nous revenions à l'école? Ça ne me dérange pas du tout de les amener à Arbar, mais avant faut-il terminer notre voyage. D'abord, peut-être ont-ils des proches à qui nous pouvons les remettre.''

Il se tourna vers la fillette consciente pour lui demander ce qui leur était arrivé, mais l'enfant refusa de dire quoi que ce soit, beaucoup trop terrorisée par ce qui lui arrivait.

Fyra repoussa la fiole du professeur d'assassinat tout en s'asseyant avec peine à l'intérieur de son véhicule. Les deux jeunes filles reposaient à ses côtés, même si elles ne semblaient pas leur faire entièrement confiance. Quant à Fyra, elle soupira de frustration aussi soudainement que les bandits étaient sortis de leur cachette!

"Laissons-les se reposer. Que contient cette fiole? Si c'est une potion de guérison, je n'en veux point. On pourra me venir en aide à Amherst, je ne veux pas gaspiller inutilement de vos effets. Pour ce qui est de ces adorables fillettes, nous allons les emmener avec nous. Peut-être auront-elles de la famille chez qui nous pourrons les déposer, en effet. Sinon, à Chirqook, je connais un endroit sûr où nous pourrons les laisser. Ma cousine prend soin de plusieurs enfants. Êtes-vous capable de conduire ou vous voulez que je le fasse?"

Lorsqu'elle parla des enfants, le regard de Fyra s'adoucit instantanément... Même si la jeune fille réveillée tenait sa sœur dans ses bras de façon protectrice et regardait les deux professeurs avec méfiance. Pourtant, cela ne semblait pas déranger la demie elfe, qui comprenait très bien le malaise.

Thanaris n'avait jamais été très à l'aise avec les jeunes enfants, aussi laissa-t-il à Fyra la tâche de s'occuper d'eux. Ce n'était pas qu'il ne les aimait pas, bien au contraire, mais le directeur adjoint ne se sentait jamais vraiment en confiance avec lui-même auprès d'enfants. Avant d'être un modèle ou un protecteur, il avait toujours été un assassin, un homme qui cachait sous ses airs ordinaires un certain plaisir à tuer. Il doutait donc énormément de sa capacité à s'occuper correctement d'un enfant, ce qui l'avait amené à fonder l'école: il pouvait garder une image de père protecteur sans avoir à approcher les jeunes autrement qu'en professeur.

''C'est une sorte de potion de guérison, mais elle ne sert qu'à guérir les infections probables'' expliqua-t-il en débouchant la bouteille. ''Ça fonctionne assez bien sur les brûlures, alors je pense que vous devriez vous en servir. L'autre fiole est un anti-poison assez puissant, mais il sert aussi à traiter des blessures. Disons que je le garde en cas d'urgence.''

Tendant la fiole à Fyra, il alla se placer à l'avant du chariot pour lui montrer qu'il serait capable de la diriger. La route était beaucoup plus sûre que la première qu'ils avaient parcouru.

Fyra déposa tout simplement la potion à côté d'elle et remit le bouchon dessus. Là, son orgueil se démontrait! La professeur ferma ensuite la porte, cherchant des vêtements dans ses valises pour se changer. La petite fille ne semblait pas du tout à l'aise avec la situation, mais Fyra se changea tout de même avant de s'occuper d'elle pour être un peu plus à l'aise. Thanaris n'entendait pas vraiment ce qui se disait à l'intérieur, mais pendant tout le reste du trajet, des voix fusèrent de l'intérieur, même que, vers la fin, quelques éclats de rire furent perceptibles! La demie elfe avait donc réussi à se lier, même après ce qui était arrivé, avec la -ou les- petite(s) fille(s)!

Thanaris eut un sourire lorsqu'il entendit les petites filles rire à l'intérieur. Il s'attendait à ce que la professeure soit capable de parler aux enfants en peu de temps, mais elle semblait même réussir à leur faire oublier ce qui venait de leur arriver. ''Elles ont sûrement été victimes d'une bande de pillards'' pensa-t-il en dirigeant la calèche à travers la plaine. Justement le genre d'histoires qui m'ont poussé à créer l'école.

Le directeur adjoint se mit à repenser à ce fameux jour au cours duquel il avait fondé l'école. C'était déjà si loin, qu'il ne peut s'empêcher de se sentir vieux. Pour un elfe, c'était plutôt normal, mais il avait déjà de la difficulté à se souvenir de tous ces événements. En l'espace d'un an ou deux dans une vie qui en comptait plus de cent, tout avait changé.

Ce fut quelques heures plus tard qu'ils virent Amherst apparaître au loin, avec ses hautes murailles de pierre. La cité avait connu des guerres auparavant et même si la paix était assurée depuis des années, elle avait conservé cet héritage militaire. Elle comptait donc de nombreuses casernes vides qui avaient été converties en entrepôts, boutiques ou même en temples!

''Nous arrivons!'' dit-il aux filles dans le chariot, ce qui fut aussi la première chose qu'il eut dite de tout le reste du voyage.

Des cris de joie fusèrent de l'intérieur. Fyra et les petites semblaient vraiment dans de bons états d'esprit! Celle-ci ouvrit une petite portière secrète qui laissait entrevoir le visage de la professeure et qui la laissait, elle, voir Thanaris.

"Vous avez perdu votre langue en chemin? J'espère que vous allez parler un peu plus à l'intérieur de la ville parce que j'aimerais aller à plusieurs endroit, si nous n'avons pas un horaire trop chargé... Dont l'énorme temple de Arth'gand, le Dieu de la lumière et de la bonté."

Deux autres paires de yeux, d'un bleu pétillant, apparurent aussi à l'embrasure secrète. Ils ne semblaient pas du tout empreint de tristesse, mais ceux de Fyra... Étaient différents.

Thanaris fit mine de ne pas prêter attention à ce qui se passait à l'intérieur de la charrette, pour ne pas brusquer le ''travail'' de la professeure avec les enfants. Entendant la portière secrète ouvrir derrière lui, il se retourna et sursauta en apercevant les yeux qui l'observaient. Pourtant, ce n'était que de la comédie : ses sens elfes lui permettaient de détecter ce genre d'ouverture secrète, tout comme ses sens d'assassins étaient plus qu'aiguisés. Quand elle l'aborda, il tourna la tête et quand elle lui demanda s'il avait perdu sa langue en chemin, il répondit: ''F'penfe que foui, parfe que f'me fens un feu fide'' imitant un vieillard sans dents.

Aux portes de la ville, on les arrêta. Deux gardes humains costauds, portant armures métalliques et hallebardes, vinrent les voir pour inspecter ce qui se trouvait dans la charrette. Thanaris leur dit qu'ils pouvaient fouiller ce qu'ils voulait, ''sauf peut-être une passagère en particulier dont je peux me charger!'' Les gardes ouvrirent les portières et inspectèrent la cargaison, apercevant les enfants. ''Ce sont vos enfants?'' demanda un garde, surpris. ''J'pense pas qu'ils sont à vous...''

Les deux petites fille rirent de la blague de Thanaris, visiblement de meilleur humeur que lorsqu'on les avait trouvées. Fyra rigola et referma ensuite la petite portière lorsqu'on les aborda aux portes. Là, elle savait déjà tout ce qu'elle devait faire. Ayant pris les petites filles sous ses bras, restant toutes assises, la professeure d'arts se prépara à jouer le jeu, sachant ces petites dociles et intelligentes, son plan fonctionnerait. Lorsqu'on lui demanda si les enfants étaient les siens, elle rit et embrassa le front des petites, chacun leur tour.

"Quels compliments vous nous faites, messieurs! Ces deux petits anges ne sont guère les nôtres; nos nièces elles sont, par contre. Nous les ramenons à leur parents pour qu'elles puissent assouvir leur envie de voir leurs aimés!"

Battant des cils en regardant les deux belles petites filles, comme émerveillée par leur beauté et pleine d'amour pour celles-ci, Fyra les regarda plus qu'elle regarda les deux gardes, permettant ainsi aux autres de croire qu'elle adorait les petites comme les siennes. Pourtant, ce n'était pas faux! De plus, elle avait de son talent de comédienne dans ce petit numéro, ce qui lui donnait encore plus un air naturel.

Devant une telle performance, les gardes perdirent toute méfiance et s'excusèrent même avant de laisser le véhicule entrer dans la ville. Thanaris eut à payer un maigre frais de péage et se dirigea ensuite vers une étable indiquée par les gardes. Passant difficilement dans les rues de la ville bondée, il fallut une dizaine de minutes pour se rendre à l'établissement, même s'il n'était qu'à deux rues de là. En y arrivant, le directeur adjoint paya un palefrenier boutonneux en lui demandant de s'occuper des chevaux. Pour peu de frais, les employés de l'étable proposaient aussi d'entreposer la carriole.

''J'imagine que nous pouvons leur faire confiance'' dit Thanaris à voix basse à Fyra. ''Je doute que l'endroit soit très fort en matière de sécurité, mais je ne pense pas qu'on tentera de nous voler quoi que ce soit. Gardons nos baggages avec nous et si jamais quelqu'un réussit par miracle à voler notre transport, je devrai admettre qu'il l'aura mérité. Je vous suis, Fyra.''

Lui faisant signe d'avancer vers l'endroit où elle le désirait, Thanaris prit leurs baggages dans la calèche et les distribua à leurs propriétaires.

Fyra sourit tout le long du trajet, même lorsque Thanaris parla de vol. Là, elle en ria, même! Lorsqu'elle reprit ses esprits -les deux petites filles la regardant de travers-, la professeur d'arts incita Thanaris à la suivre dans les rues, une main de fillette dans chacune de ses deux mains.

"Il n'y a aucun problème pour les vols! Si jamais quelqu'un voit une autre personne que moi sur cette calèche ou à l'intérieur, elle sera immédiatement arrêtée puisque une branche de ma famille habite cette ville. Aucun soucis là dessus!"

Ils marchèrent dans les rues bondées et Fyra eût le bon réflexe de taper sur des mains baladeuse quelques fois (soit pour sa bourse ou pour elle-même...). Ils se rendirent dans un quartier opulent, dans une maison assez grosse, bordée d'un chaleureux jardin et petit étang surplombé d'un merveilleux petit pont de pierre. Les deux petites filles semblaient anxieuses au début, mais maintenant, elles étaient charmées!